LA DÉNATIONALISATION DE L’ÉDUCATION NATIONALE !
Une tendance lourde aux conséquences très concrètes…
04/02/2025
C’est une tendance lourde de l’évolution de l’État ces dernières décennies, mais elle se fait souvent de manière insidieuse, à tel point que l’on ne se rend pas toujours compte des conséquences. Néanmoins, la délégation de plus en plus importante de missions et de compétences par notre Ministère à d’autres prestataires, souvent privés, n’est pas sans poser de nombreux problèmes.
Rien de plus anodin que l’arrivée de l’hiver. Et pourtant, dans mon lycée, celle-ci n’est pas sans enjeu, la faute à un système de chauffage vétuste et mal pensé dans un bâtiment datant du début des années 1980. Cependant, l’an dernier, nous pouvions profiter pour la première fois d’une extension toute neuve de notre établissement, avec une trentaine de salles de cours neuves et un tout nouveau système de chauffage basé sur la géothermie. Joie ! Hélas, aux premiers frimas, c’est, si j’ose dire, la douche froide ! Le chauffage semble réglé avec un thermostat bien bas, et encore quand il est activé. Il y a une quinzaine d’années, le problème aurait été réglé facilement, du fait de la présence permanente d’un fonctionnaire chauffagiste dans l’établissement. Mais aujourd’hui, les choses sont bien plus compliquées : en effet, le bâtiment a été construit par la Région, c’est donc elle l’interlocutrice du lycée pour ce qui concerne le bâti… mais ce n’est pas elle non plus qui gère le chauffage, celui-ci se trouvant sous l’égide de l’entreprise de BTP constructrice du bâtiment, et qui s’en occupe par le biais d’une délégation de service public. Autrement dit, là où l’affaire pouvait être réglée auparavant dans la journée, il faut aujourd’hui passer par un labyrinthe d’interlocuteurs et de mails avant qu’une simple information puisse nous être donnée.
Autre sujet d’actualité dans les lycées en période hivernale : l’ouverture de la plateforme Parcoursup, sur laquelle les élèves de Terminale vont devoir entrer leurs vœux concernant les formations de l’enseignement supérieur qu’ils souhaitent rejoindre. Forcément, en tant que professeurs principaux nous ne sommes pas experts des enjeux du post-bac, et les élèves doivent souvent aller voir les conseillers d’orientation, désormais curieusement nommés Psychologues de l’Éducation nationale (Psy – EN), pour trouver leur voie dans la jungle de l’enseignement supérieur. Cependant, ceux-ci ne sont pas forcément en nombre suffisant, avec en moyenne un Psy-EN pour 1200 lycéens. Ainsi, une autre action souvent entreprise consiste à se rendre dans les salons étudiants, généralement privés. Les organisateurs ne font pas payer les visiteurs, mais les établissements qui viennent s’y vendre (osons le mot), et qui là aussi sont la majeure partie du temps privés. En effet, du fait des restrictions budgétaires, les établissements publics manquent souvent de fonds pour participer à ces grand-messes de l’orientation. La présentation des filières post-bac fait donc la part belle à toute une kyrielle d’écoles plus ou moins sérieuses, mais qui savent généralement se présenter sous leur meilleur jour.
Que peut-on voir à travers ces deux exemples issus du quotidien de n’importe quel enseignant ? D’abord, on observe une multiplication des interlocuteurs et une réelle complexification des procédures, que ce soit pour les élèves et leurs parents ou pour les professionnels que nous sommes. Tout ceci engendrant des tâches chronophages de coordination, de passation d’informations, souvent inutiles pour remplir correctement nos missions. Qui n’a pas aujourd’hui dû remuer ciel et terre dans son établissement pour régler un simple souci de photocopieuse ?
Ensuite, on ne peut que constater la pénétration croissante des acteurs privés dans le monde de l’enseignement, qui ne fait que s’accentuer avec l’usage du numérique (pensons ne serait-ce qu’au célèbre logiciel que tout le monde utilise désormais pour gérer son emploi du temps, l’enregistrement des notes et des bulletins…). Or, si l’on est attaché au service public, on ne peut que s’inquiéter de voir des pans de plus en plus importants de notre activité confiés à des acteurs à but lucratif, qu’il y ait signature de chartes ou de contrats avec le Ministère ou non. Adam Smith, ce philosophe-économiste libéral du XVIIIe siècle connu pour sa métaphore de la « main invisible », défendait déjà le caractère non-marchand de l’éducation, nécessaire selon lui pour enseigner à la population les connaissances qui lui permettent de remplir ses devoirs civiques. Alors que le monde scolaire a pu jusqu’à présent rester relativement épargné par les assauts de la marchandisation à tout va, il importe de protéger notre îlot pour que le savoir et sa transmission restent au cœur de notre travail, sans que les intérêts matériels n’entrent trop en ligne de compte.
Colin MARTET, professeur de Sciences économiques et sociales en lycée, membre du bureau académique.
Comme pour cette tribune de notre collègue Colin nous sommes preneurs de chacune de vos remontées de terrain (constats, suggestions…) afin de publier vos témoignages (anonymement ou pas selon votre volonté) et surtout d’envisager des actions concrètes face à une catastrophe annoncée à l’adresse mail ci-dessous :
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